L’appel à grandir des startups du Paris Fintech Forum 2018 !

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Au delà des promesses, des petites phrases, des annonces et de ses effets, les fintechs ont quitté le Palais Brongniart en ayant marqué l’édition 2018 du Paris Fintech Forum par une volonté farouche de continuer à grandir !

De toutes les conférences et entretiens auxquels j’ai pu assistés*, cette ambition de changer d’échelle jusqu’au leadership était de tous les débats, de toutes les prises de parole. Cela est évident me direz-vous, en particulier pour des startups ambitieuses, en recherche d’opportunités et de relais de croissance. Certes … mais pas sans conséquence !

Il me semble que nous avons clairement là toute une industrie de l’innovation pour laquelle le temps de la compétition acharnée est venu. Et cette compétition va s’accélérer. Elle est mondiale et alimentée par les positions agressives des Etats et des régulateurs avec, en arrière plan, l’ombre de la Chine et de ses voisins asiatiques qui plane sur une Europe à la traine et une Amérique autocentrée.

L’industrie du paiement qui fait face au digital est un exemple assez frappant. Là où la démonétisation en Inde permet à la fintech Money On Mobile d’y croitre de 250%, le français Lemon Way, de son côté, s’alarme d’une Europe à la peine et lance un courageux appel à la construction d’un compte de paiement digital, pan-européen et surtout compétitif.

Dans cette bataille entre Etats, l’Europe des régulateurs doit faire sa mue et vite.

J’ai été frappé d’apprendre que l’anglais Clearbank et l’allemand Fidor, avaient du expliquer à leurs autorités de tutelle ce que pouvaient bien être le « Cloud » pour le premier et le dispositif de « bac à sable réglementaire » pour le second. Cela pourrait prêter à sourire n’est-ce pas ? Alors, il faut féliciter Villeroy de Galhau, le Gouverneur de la Banque France, d’avoir rappelé que son institution a été la première à avoir nommé un « Chief Digital Officer » en son sein.

D’une dimension régionalisée, les fintechs s’affirment désormais plus mondialisées, cherchant à toucher des géographies différentes en développant des formats démultipliables. Dans les éléments de langage de ces entrepreneurs de rupture, la technologie revient souvent cette année comme le principal vecteur de leur croissance mondiale et j’ai été surpris que l’on parle si peu d’usage.

Il est donc loin le temps où les fintechs voulaient faire la peau aux vieilles dames de la finance et cherchaient des chemins de traverse côté réglementaire.

L’heure est à la construction de partenariat stratégique.

On peut donc dire sans se tromper que les deux prochaines années verront l’accélération du phénomène de fintégration, à savoir des partenariats de distribution avec des banques, des partenariats entre fintechs et des assemblages des deux. Sur certains marchés domestiques, comme celui du financement alternatif par exemple, les marges sont trop faibles pour les fintechs, l’environnement trop concurrentiel.

Que restera-t-il de ces acteurs sans alliance et sans accélération à l’international ?

 

Il est certain que cette course à la croissance va entrainer son lot de perdants. Car toutes les fintechs n’auront pas la force, l’intelligence, la maturité ou la résilience de s’engager dans de longs mois de discussions et de négociations. A écouter Moneythor, il faut en moyenne 12 à 18 mois pour construire un partenariat stratégique. A ces délais s’ajoute celui de la mise en production qui peut prendre jusqu’à 4 bons mois.

Les fintechs les plus matures ont certainement intérêt à ne surtout pas se disperser. C’est ce que recommande Kabbage qui limite sa stratégie d’alliance à 2 voir maximum 3 partenariats par marché.

Cette situation de « partnership pickcing » est très défavorable pour les banques.

 

Pour convaincre les meilleurs candidats à la fintégration, les plus prometteurs, les plus disruptifs, elles vont devoir apporter toutes les garanties nécessaires, en terme de délai, de rapidité d’exécution, de mise en production et d’effet d’échelle immédiat. A cet exercice, le Groupe BPCE a frappé les esprits avec l’annonce de son partenariat avec la fintech Meniga.

Le Paris Fintech Forum a ceci d’intéressant qu’il permet de prendre la température d’un écosystème en construction.

Cette année, c’est celle de la maturité, de la recherche de débouchés et de capacités distributives. C’est aussi une prise de conscience que l’on peut résumer ainsi.

Après tout … si je possède une technologie que je peux rendre exploitable par des acteurs installés de mon écosystème qui en ont besoin pour accompagner leur propre transformation digitale, ou pour servir leur propre projet client … alors pourquoi ne pas en faire un « core business » ? C’est le cas de Kabbage, de United Credit, de Meniga, de Wirecard.

Ils préfigurent les grands vainqueurs de la « API-fintech » de demain. Et ce sont les banquiers ou les TelCo qui les intègrent qui au final en parlent le mieux.

 

Côté BtC, les néobanques ne m’ont pas convaincu cette année alors qu’elles avaient été incroyables l’année dernière.

Elles semblent s’être laissées enfermer dans une certaine « régionalité » et leur modèle économique de l’effet « Waouh » est encore loin d’avoir fait ses preuves. Le problème pour les néobanques vient du fait qu’elles ont ces derniers mois dépensé beaucoup d’argent et d’énergie à sécuriser leur business par l’obtention indispensable de licences bancaires. Sans licence, il est très difficile pour ces banques d’une nouvelle forme de gagner de l’argent.

Effet d’annonce ou réalité ? Revolut, qui gagnerait 5 à 10.000 nouveaux clients par jour, se dit déjà profitable. N26 avec une conquête de 2.000 clients par jour, ne dit pas autre chose et pourtant son CEO a l’honnêteté de reconnaitre que globalement le « break-even » de sa structure est attendue pour 2019.

D’ici 5 ans, à en croire l’anglais Tandem, le segment des néobanques se sera fortement consolidé, restructuré avec l’aide de grandes banques probablement. Elles espèrent tirer profit de l’open-banking, de la DSP2 et de la RGPD.

Peut-être déjà trop nombreuses, les néobanques ont pris conscience de l’émergence d’une concurrence plus vive entre elles et annoncent en réaction la sortie prochaine d’offres jamais vues … en bon teasing du prochain Paris Fintech Forum !

 *J’ai assisté pour vous aux conférences et entretiens suivants : Unbundling / Rebundling finance with fintechs ; Neobanks: and so what ; Interview: Wirecard ; Alternative lending: what’s hot in 2018 ; Open banking what are we speaking about? ; Leveraging bank assets by connecting to fintech platforms ; The lego bricks of finance as a platform ; Interview: BPCE ; Interview: Orange Bank; Future of finance in Europe at Fintech age ; The role of tech in alternative finance ; The challenges of moving from physical cash to digital ; Interview: Villeroy de Galhau ; Interview: Amundi ; University, Fintech & Corporate ; From banking to finance as a platform.
Cet article a été publié pour la première fois sur Linkedin le 2 février 2018. 
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