A n’en pas douter le 16 mars prochain chez ATKearney alors que des experts débattront des nouvelles technologies de l’assurance et des enjeux pour les acteurs historiques, le modèle disruptif de l’assurance P2P, également connu sous le nom d’assurance collaborative, sera au cœur des débats.
Mais la vraie rupture pour les acteurs traditionnels mutualistes n’est-elle pas à considérer de l’intérieur ?
Une assurance collaborative, c’est quoi ?
Dans un papier intitulé Comment garder l’esprit mutualiste ? L’émergence de la mutuelle 3.0 publié en novembre dernier par la Revue Banque, Matthieu Seguin, responsable de gestion d’activités à la MACIF, en décrit les contours.
Fondée sur la création de communauté d’assurés, l’assurance collaborative est un modèle innovant permettant à ses membres de se réunir sur une plateforme pour se constituer une caisse de solidarité ayant pour but …
… de prendre en charge la franchise qui sera supportée par l’un d’entre eux en cas de sinistre.
Imaginez une communauté d’excellents conducteurs conduisant tous des voitures connectées – et demain encore mieux autonomes (d’après le Boston Consulting Groupe, elles pourraient représenter 10% des ventes en 2035) dans un environnement de surcroît peu accidentogène.
Si vous faites partie de cette communauté, votre intérêt commun est d’optimiser votre niveau de franchise pour optimiser celui de vos cotisations. Autrement dit, vous êtes à l’aise pour assumer, avec d’autres qui vous ressemblent, une franchise plus élevée car vous savez que dans votre communauté ! Vive le Big Data ! les comportements à risque sont limités, les sinistres moins fréquents.
Ces communautés, qui partagent des données liées à leur comportement, mettent en place des règles strictes d’appartenance ce qui maintient leur cohésion. Pour vous faire une idée du fonctionnement de ces nouvelles plateformes, jeter un coup d’oeil à Guevara, l’insurtech anglaise de Brighton qui veut révolutionner l’assurance automobile ou encore la startup allemande Friendsurance.
L’exemple du Pay How You Drive
Face à l’émergence de ces nouveaux acteurs, l’auteur s’interroge donc sur la réponse à apporter à cette nouvelle forme de concurrence et sur les solutions à mettre en œuvre du côté des sociétés d’assurance mutuelle.
Une stratégie serait de s’emparer de ce type de modèle pour en intégrer les fondamentaux dans des produits revisités. Avec YouDrive par exemple, Direct Assurance (AXA) développe un produit Pay How You Drive basé sur l’individualisation de tarifs adaptés à un certain profil de conducteurs, ici ce sont les comportements responsables des jeunes conducteurs qui sont visés et récompensés.
Face aux insurtech, on pourrait qualifier cette réponse des acteurs traditionnels de défensive permettant principalement l’évitement du phénomène d’anti-sélection. En d’autres termes, mieux vaut garder les meilleurs conducteurs chez soi au risque sinon de perdre en compétitivité-prix.
Une autre solution pour les mutualistes serait de construire des communautés de sociétaires fondées sur des profils et comportements homogènes et de les développer. Après tout …
… Pourquoi laisser des acteurs du web fédérer de petites communautés pour mutualiser les franchises alors que cette solidarité est dans l’objet social même d’une société mutuelle d’assurance ?
En revanche, l’assureur doit démontrer qu’il peut être un tiers de confiance irréprochable quant à la protection, l’utilisation faite des données de ses assurés et leurs impacts sur ses produits et ses prix.
Valoriser son ADN mutualiste
Mais la riposte des mutuelles est ailleurs. Elle est dans la valorisation de leur actif le plus précieux, le sociétariat.
L’enjeu est de transformer son assuré en véritable client-sociétaire-investisseur et cette stratégie pourrait se construire sur le socle des certificats mutualistes nés de la loi sur l’économie sociale et solidaire de 2014.
Ceux-ci pourraient permettre à une société d’assurance mutuelle de financer des projets ou d’élaborer de nouveaux produits préalablement validés par ses sociétaires, une façon de les responsabiliser, de les engager, de les faire participer à la solidité du modèle mutualiste,et surtout de tirer profit de leur capacité créatrice.